Le vice-premier ministre, ministre des affaires étrangères, Christophe Lutundula rappelle l’épisode de Nairobi : « Nous sommes en discussion, le général James Kaberebe dit, ce n’est pas nous le Rwanda qui vous attaquons. Makenga dont le groupe est en action, vit en Ouganda c’est l’Ouganda qui pousse ces gens et leur donne la logistique.

C’est à croire donc que les FARDC font face à un ennemi non identifié! Nos services de renseignements, plus spécialement ceux militaires, ne sont-ils pas en mesure de dire précisément quel pays nous attaque sous couvert du M23 pour nous assurer d’une réponse diplomatique et militaire adéquate? Ne nous dites pas ça, s’il vous plaît ! Les bras m’en tombent !

En effet, il me paraît burlesque de discuter avec Kagame et s’accorder même sur un cessez-le-feu, alors que c’est l’Ouganda qui serait en cause. L’attaque du M23 juste au lendemain du sommet de Luanda serait une signification de ce que le Rwanda, malgré son art de la dissimulation et sa dangerosité, n’a pas d’emprise sur ce groupe armé, du moins aujourd’hui, et que la RDC s’est trompée d’interlocuteur. Que vaudrait dans ce cas un accord signé avec un interlocuteur qui n’en est pas un? « Res inter alios acta aliis nec nocere nec prodesse potest. »: « Un accord entre parties ne peut ni nuire ni profiter aux tiers. » C’est le principe de la relativité des conventions.

Une chose est certaine. Depuis quelques temps, le Rwanda et l’Ouganda ont aplani les différends qui les opposent et le fils Museveni ne fait pas mystère de l’embellie fraternelle de leur relation historique. Il n’est pas exclu que ces deux pays, dont on connaît les affinités, mutualisent des stratégies pour nous tourner en bourrique. Par ailleurs, la géolocalisation de Bunagana à la bifurcation des trois frontières se prête à ce cynique jeu de ping-pong. En effet, profitant de notre légendaire incurie, l’Ouganda soutiendrait ce groupe terroriste sans se dévoiler et le Rwanda accusé comme habitué de ce manège irait négocier sachant que ses engagements ne comptent pas pour le M23. Pendant ces temps, l’agression se poursuit. Et, le génie rwandais doit expliquer comment ses soldats sont arrêtés bien à l’intérieur de nos frontières et des effets militaires floqués d’écussons rwandais sont saisis sur les éléments du M23 neutralisés !

Mais, au-delà de tout, avons-nous besoin de nous adosser sur les dires de James Kabarebe pour savoir qui nous attaque? Nos services et forces de défense et de sécurité ne sont-ils pas organisés et outillés pour identifier le danger à nos frontières et y répondre conséquemment ? D’où, ma surprise devant la naïveté, feinte certainement, de Lutundula quand il s’interroge sur le fait qu’à Nairobi, au cours des discussions, James Kabarebe n’ait pas imputé à Kampala la paternité du M23/Makenga en présence des officiels ougandais.

Mais, quel intérêt aurait-il eu, ce James, à le faire alors qu’il n’est ni un agent congolais, ni un obligé de la RDC à un titre quelconque en la matière. En bien de choses l’Ouganda et le Rwanda sont solidaires. À l’égard de nos ressources, ils ont des ambitions à la fois semblables et concurrentes. Malheur à ceux qui s’y fient. La guerre de Kisangani doit nous le rappeler au cas où certains seraient frappés d’amnésie.

Qu’à cela ne tienne, d’où que vienne l’agression – du Rwanda ou de l’Ouganda – nous devons nous armer pour la repousser et protéger l’intégrité de notre territoire national. Loin d’être une option, c’est une contrainte pour notre survie en tant qu’État et Nation. Cependant, il est impérieux de remettre les choses à l’endroit, c’est-à-dire nous organiser, notamment par la restructuration du commandement de nos forces armées. On ne peut espérer aboutir à des résultats qui soient différents avec les mêmes paradigmes. On ne le dira jamais assez.

Sam Bokolombe