La nomination de Tommy Tambwe Runiga comme coordonnateur du Programme de désarmement, démobilisation, réinsertion communautaire et stabilisation (PDDRC-S) par ordonnance présidentielle ne cesse de défrayer la chronique. Après Dénis Mukwege, Acaj, la plate-forme de 103 groupes armés, le Président de la nouvelle société civile congolaise et les forces vives du Sud-Kivu, l’ONG internationale des droits de l’homme Human Rights Watch a, à travers un article de presse, dénoncé « la nomination d’un ancien rebelle à un poste clé en RD Congo » :

« Tambwe a été l’un des chefs de file des principaux groupes rebelles soutenus par le Rwanda, responsables d’innombrables violations des droits humains dans l’est du Congo au cours des 25 dernières années. En 2002, lorsqu’il était vice-gouverneur du Sud Kivu administré par la rébellion du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), Amnesty International et Reporters Sans Frontières avaient relevé qu’il avait ordonné l’arrestation de journalistes qu’il jugeait critiques à l’égard de son mouvement.

En 2012, des enquêteurs des Nations Unies ont rapporté que Tambwe dirigeait l’Alliance de Libération de l’Est du Congo (ALEC) tout en ayant « trouvé protection au Rwanda ». Le groupe était allié à la rébellion du M23, responsable de crimes de guerre généralisés, notamment des exécutions sommaires, des viols et des recrutements forcés.

Sans surprise, bon nombre de Congolais ont rapidement fait part de leurs inquiétudes après la nomination de Tambwe. Le lauréat du prix Nobel de la paix, le Dr Denis Mukwege, a exprimé sa « circonspection » et a réitéré l’appel conjoint, auquel s’était rallié Human Rights Watch, en faveur d’un mécanisme d’assainissement visant « la mise à l’écart des institutions publiques des personnes responsables de violations des droits humains ». Des dizaines de groupes de la société civile et mouvements citoyens des provinces du Nord et Sud Kivu ont averti que la nomination de Tambwe « porte en elle déjà les germes de l’échec de ce processus ». Une coalition de milices Mai-Mai l’a décrit comme une « tactique déguisée de déstabilisation ». Certains parlementaires ont également appelé Tshisekedi à faire machine arrière.

Les tentatives successives de désarmement, démobilisation et réintégration des combattants dans la société congolaise ont échoué au cours des deux dernières décennies, malgré les millions de dollars injectés par les bailleurs internationaux. Des milliers de combattants qui s’étaient rendus ont finalement regagné la brousse tandis que des auteurs d’abus ont été récompensés par des promotions au lieu d’être tenus pour responsables.

Pour réussir, ce nouveau programme a besoin de la confiance des communautés de l’est du Congo. Un mauvais départ risque d’en faire une nouvelle occasion manquée d’assurer la sécurité de la population de la région. »